A propos d'internet

Internet pour les nuls... et qui entendent le rester

Historique

Le premier réseau (network) à commutation de paquets en mode non connecté est vraisemblablement celui réalisé par National Physical Laboratories au Royaune Uni (U.K.) en 1968. Aux Etats-Unis cette technologie est mise à disposition de l'ARPA (Advanced Research Project Agency) du DOD (Department Of Defense). Le DOD avait deux problèmes à résoudre. 1 - faire communiquer ses systèmes isolés (computers) et ses petits réseaux LAN (Local Area Network) très hétérogènes et incompatibles entre eux. 2 - Vu que l'Union soviétique, l'axe du mal de l'époque, pouvait, avec ses missiles atteindre n'importe quel point sur la planète, il fallait disposer d'un réseau durci et adaptatif, persistant en cas de frappe locale. En 1963, Paul Baran, de Rand Corporation réalise pour l'US Air Force une étude dans laquelle il énonce les principes et avantages d'un réseau décentralisé à structure maillée. On dit qu'un réseau est maillé quand il existe plus d'un chemin pour aller d'un point à un autre (1). La redondance des liens et des computers doit garantir sa tenue en cas de frappe adverse. La première démonstration de faisabilité de ce réseau nommé Arpanet, fut faite à UCLA (University of California, Los Angeles) avec quatre computers constituant ainsi un réseau avec quatre noeuds (nodes). En 1972, la première conférence internationale sur les communications informatiques se déroule à Washington. A cette occasion une démonstration d'un réseau Arpanet de 40 noeuds (nodes) est effectuée devant des spécialistes de plusieurs pays. Les discussions entre les tenants de différents projets vont dans le sens de la nécessité de travailler sur des protocoles de communications communs pour atteindre à une interopérabilité totale. Les recherches se poursuivent les années suivantes et l'Arpanet, devenu Internet (Internetwork, réseau de réseaux ), finit par être pleinement opérationnel.

D'abord utilisé par l'armée, les universités et les instituts techniques, il finit par être ouvert au public vers le milieu des années 90. Le succès est immédiat et le nombre de "connectés" n'a depuis cessé de croître. Les services fournis se sont accrus au fil des ans, depuis UUCP (Unix to Unix Copy) utilisé pour les transferts de fichiers jusqu'au multimédia de nos jours. Pour ce qui est de la diffusion des connaissances, internet peut être comparé à l'invention de l'imprimerie. On remarquera au passage que, de même que Karl von Linnaeus (1707-1778) utilisa le latin pour sa classification des plantes, le langage natif d'internet est l'anglais. Les langages des scientifiques changent avec les époques. Nous avons mis en italique les mots spécifiques, lesquels constituent un apport de sang neuf pour n'importe quelle autre langue et contribuent à son évolution et son enrichissement.

(1) : Le principe de base des réseaux maillés est connu depuis longtemps. Le chemin qui, dans l'antiquité, menait les pèlerins à St Jacques de Compostelle n'était pas unique et, quand une bande de brigands était signalée sur une branche, les pèlerins s'empressaient d'en choisir une autre pour continuer leur périple. La piste Ho-Chi-Min qui permit, en temps de guerre, aux vietnamiens de s'approvisionner en Chine était en fait un dédale de sentiers que les plus sévères bombardements ne pouvaient détruire.

Comment fonctionne internet

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Bien qu'internet soit une application entièrement nouvelle, ceux qui se souviennent de l'époque glorieuse des chemins de fer, que nous situons au XXème siècle, ne manqueront pas de faire le rapprochement. Le chemin de fer comportait des gares (nodes) et des voies (links). Les marchandises étaient groupées par blocs appelés wagons. Ces wagons portaient une indication de provenance et de destination, ils étaient triés et aiguillés en fonctions de leur destination dans les fameuses gares de triage (routeurs). Un ensemble de signalisation très élaboré (protocole) permettait au traffic de se dérouler harmonieusement. Le réseau ferroviaire était maillé, dans le cas où une voie était indisponible (travaux, accident,...) on pouvait acheminer les wagons par un autre itinéraire. Le plan du réseau était bien défini et connu des cheminots mais le destinataire se préoccupait peu de savoir par où ses marchandises avaient transité. Le système fonctionnait selon le principe client/fournisseur. Le fournisseur étant l'entité qui délivre la marchandise.

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Ainsi sur internet, les données (data) sont groupées en paquets (datagram), sont triées et aiguillées dans des routeurs. Les voies physiques sont constituées de fibres optiques, câbles sous-marins, liaisons satellite, faisceaux hertziens, etc... Chaque paquet de données porte sur lui, dans l'en-tête (header), l'adresse de l'expéditeur et celle du destinataire. La signalisation s'appelle TCP/IP (transport control protocol/internet protocol). Ce protocole et très sophistiqué, ainsi, si un paquet n'est pas parvenu ou bien si son intégrité a été corrompue il peut être reémis. On voit ici le progrès ! Dans le cas du transport ferroviaire il était difficile de reémettre un wagon. Enfin... cela demandait un certain temps. Internet fonctionne selon le principe client/serveur. Les serveurs sont des entités (matériel et logiciel) qui fournissent, non plus une marchandise mais un service, à un demandeur qui est donc le client. En fait on appelle client TCP/IP le logiciel (software) applicatif qui permet de générer les requêtes et gérer les réponses. La figure ci-contre donne un exemple de réseau maillé avec des routeurs.

L'analogie est frappante mais ne saurait être poussée trop loin. Alors que pratiquement toutes les voies de chemin de fer étaient nationales et convergeaient vers une capitale (voir un plan de l'époque où tout converge vers Paris, cependant des voies transverses assuraient le maillage), internet est mondial et son centre n'est nulle part. C'est un réseau de réseaux, une structure pyramidale formée de plusieurs épines dorsales (backbone), lesquelles desservent une constellation de réseaux autonomes, lesquels desservent à leur tour des sous-réseaux. C'est donc un réseau de réseaux , d'où l'appellation internet et la comparaison à une toile d'araignée (web). La structure globale est si complexe et évolutive que nul administrateur de réseau ne pourrait en donner une description complète. Pour un utilisateur final (client) qui se soucie peu des techniques sous-jacentes, internet peut être décrit par la figure ci-après. C'est la puissance des protocoles de TCP/IP qui fait que le client peut atteindre le serveur qui détient les informations demandées et qui fait aussi que le serveur enverra ces informations à l'adresse du client. Une adresse d'un serveur, d'un document, d'un client, sur internet s'appelle un URL (Uniform Resource Locator).

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Comment un abonné accède à l'internet ?

Bon nombre de particuliers accèdent à l'internet par le moyen de leur ligne téléphonique. Cette ligne, habituellement en câble de cuivre les relie au central de commutation. Elle est traditionnellement appelée boucle locale d'abonné et maintenant qu'on lui demande de transporter aussi des contenus numériques elle est devenue Digital Subscriber Line (DSL).

Mais comment peut-on faire transiter des débits importants dans une ligne initialement prévue pour le transport de la parole, donc des fréquences relativement basses ? C'est en ayant recours à des procédés de modulation très sophistiqués. Néanmoins la longueur de la boucle locale d'abonné ne devra pas dépasser quelques kilomètres pour que le fonctionnement soit satisfaisant.

Comme on peut le voir sur la figure ci-dessous, le transport de la parole est conservé dans la partie basse du spectre des fréquences, c'est ce qu'on appelle la bande de base. Au-dessus (canaux en rouge) se trouve une bande réservée au flux montant (émis par le client), puis une bande (canaux en mauve) réservée au flux descendant (en provenance des serveurs). On remarque imédiatement que la bande réservée au flux montant et plus étroite que celle réservée au flux descendant. On considère que le client n'émet que de brèves requêtes mais qui donnent lieu en retour à des flux de données importants. C'est de là que vient l'appellation ADSL (Asymetric Digital Subscriber Line, soit Ligne Numérique d'Abonné Asymétrique). Bien sûr pour les besoins professionnels il existe aussi des liaisons symétriques, simplement appelées DSL, avec des largeurs de bandes équivalentes en montée et en descente. Le coût de ce type d'abonnement est beaucoup plus élevé. L'ensemble des opérations de modulation et démodulation des signaux ADSL est habituellement réalisé par une boîte (Box) souvent louée par le fournisseur d'accès.

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Les services d'internet

Comme nous l'avons vu ci-dessus, l'internet n'est qu'un support mais plein de possibilités. Des services s'y sont progressivement installés. Nous allons survoler de façon succinte les plus connus. Bien sûr pour accéder à l'internet il faut conclure un accord avec un fournisseur d'accès, ISP (Internet Service Provider) ou bien en patois local, FAI (Fournisseur d'accès Internet). Cette démarche est devenue tellement banale que je n'en dirai pas plus. Il faut aussi disposer sur son computer des applications TCP/IP, mais celles-ci font habituellement partie du lot quelle que soit la distribution utilisée, Linux, Windows™ ou autre.

Le World Wide Web (web, www)
Le web est un système distribué fonctionnant en mode client/serveur sur l'internet. Il résulte des développements réalisés au CERN en 1989 par Tim Berners-Lee, Robert Caillau et leur équipe. Le but initial était de permettre à des chercheurs de différents laboratoires, au CERN mais aussi un peu partout dans le monde, de partager des document et de mettre à dispostion de tous des résultats de travaux. C'est en 1993 avec le logiciel client Mosaic, développé par Marc Andreessen à l'Université de l'Illinois, que le web a atteint une grande simplicité d'utilisation et les capacités multimédia. Le succès fut tel que les utilisateurs, au nombre d'une dizaine en 1991, étaient déjà 100.000 en 1994. Le dialogue entre client et serveur fait appel au protocole HTTP (HyperText Transfert Protocol) lequel est implémenté, côté client, par un logiciel applicatif (browser) que nous appelons navigateur ou butineur. Les documents mis a disposition sur les serveurs sont rédigés en HTML (HyperText Markup Language) lequel s'apparente a un logiciel de traitement de texte et incorpore les directives indiquant au browser comment doit être ordonné le flot de données reçues pour restituer au document affiché à l'écran la présention élaborée par son auteur. Un document hypermédia peut contenir non seulement du texte mais aussi des images, des videos et des sons.
La messagerie (mail)
La messagerie est le service minimum offert par tous les ISP. Elle permet un échange asynchrone de messages entre personnes connectées. Par asynchrone on entend que les correspondants n'on pas nécessité d'être présents simultanément pour communiquer, contrairement au téléphone qui est un moyen de communication synchrone. Chaque utilisateur (user) dispose d'une boîte aux letres (mailbox) et d'une adresse mail sur un serveur de messagerie, lequel assure un service 24 heures sur 24. Les messages sont envoyés avec le protocole SMTP (Simple Mail Transfer Protocol), lequel définit les règles d'échange.
Les messages sont stockés dans les boîtes aux letres et le user peut relever son courrier par le biais de son logiciel de mail. Tout se passe comme pour le courrier par la poste (snail mail: courrier escargot), on va récupérer son courrier dans sa boîte aux lettres. L'utilisation du protocole POP (Post Office Protocol) rapatrie les mails en bloc, ils pourront être exploités hors connection. L'utilisation du protocole IMAP (Internet Message Access Protocol) permet de gérer son mail en ligne, classer, organiser, détruire, etc...
Il est aussi possible maintenant d'accéder à son mail directement avec son browser grâce à la formule webmail proposée par certains ISP.
On notera que l'Académie Française a proposé un certain nombre de dénominations bizzares pour mail : émel, courriel, etc... Comme le ridicule ne tue pas, les académiciens sont dits immortels.

Le diagramme ci-après donne une idée du traitement du courrier sur l'internet.
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FTP (File Transfert Protocol)
FTP permet d'établir une connection temporaire entre deux computers pour tranférer des fichiers (files). Il faut bien distinguer le transfert de fichiers du partage de fichiers que l'on sait rĂ©aliser hors internet par exemple avec NFS. Alors que le web est orienté consultation de documents, FTP lui, est orienté téléchargement (download du serveur vers le client, upload du client vers le serveur). La session se déroule souvent en mode graphique grâce à une application tournant sur le computer client mais on peut tout aussi bien pratiquer en mode ligne de commande. La session débute par le login (identification et mot de passe). Il existe de nombreux serveurs anonymous FTP, pour lesquels il n'est pas nécessaire de disposer d'un mot de passe (password).
Le forum
Site d'échange d'idées dans un domaine déterminé. On peut y lire les messages qui y ont été déposés, faire des commentaires sur les différents sujets traités et y déposer (poster) soi-même des messages sur de nouveaux sujets, toujours en restant le domaine spécifique au forum. Il existe maintenant des forums dans les domaines les plus variés. Il fonctionne comme un grand tableau d'affichage ou chacun peut lire et déposer (to post) des messages. A l'époque où les environnements des internautes étaient encore en mode texte on disait plutôt BBS (Bulletin Board Service). Les BBS furent très populaires de 1980 jusque vers 1995 qui vit la généralisation du mode graphique. Les usages varient d'un forum à l'autre. Il est habituelement requis de se créer un identificateur (ID, nickname) en ligne. N'oubliez pas que vos posts sont publics donc ce n'est pas le lieu pour des informations à caractère privé. Le forum se pratique au niveau user avec le même logiciel client browser que l'on utilise pour le web.
Le chat
Il s'agit d'une application synchrone, les participants doivent être présents simultanément de façon à pouvoir ainsi "bavarder" par l'intermédiaire de leur clavier. Dans la plupart des cas il suffit, côté client, d'utiliser un browser. Un chat room se présente comme une page web générée par un logiciel qui permet de taper des messages destinés un ou plusieurs participants. Nombreux sont les chat rooms orientés sur des sujets spécifiques. On appelle lurker un internaute qui suit ce qui se passe mais se manifeste rarement par un post. Le chat est un moyen formidable de se faire de nouveaux amis et aussi de perdre son temps.
Le wiki
Le wiki est une entité logicielle (software) qui permet aux users de librement créer et éditer (modifier) une page web. C'est un peu comme une mini base de données à laquelle chacun peut contribuer. Le premier wiki fut créé en 1995 pour le Portland Pattern Repository. Il est d'une syntaxe simple et supporte les hyperliens. Une autorisation peut ĂȘtre nécessaire pour pouvoir écrire. Le wiki est utilisé par la célèbre encyclopédie Wikipedia que chacun peut faire bénéficier de son savoir. Le wiki se pratique avec votre browser habituel.
La liste de diffusion
Le client mail habituel est utilisé. Envoyer un message à une liste de diffusion est aussi simple que d'envoyer un mail. Il sera reçu par tous les abonnés à la liste. Ces abonnés constituent une communauté ayant le même sujet d'intérêt. L'accès à une liste de diffusion peut être public ou restreint mais nécessite une inscription. Pour vous inscrire, vous entrez l'adresse à laquelle vous désirez recevoir les messages sur la page d'inscription. Quand vous vous initialisez un fil de discussion (thread), optez pour un sujet bien lisible et suffisamment représentatif de la question abordée pour rendre les archives utilisables. Si votre réponse n'est plus dans le fil du sujet, Changez le sujet et bifurquez en un nouveau thread (fork).
Telnet
Telnet fonctionne sur le principe maître/esclave comme ce qui existait dans les entreprises au début de l'utilisation de l'informatique : un gros ordinateur central et des terminaux déportés. Sauf que grâce à l'internet ceci peut se pratiquer à l'échelle planétaire. L'ordinateur local émule un simple terminal à partir duquel on peut demander l'exécution de tâches sur un serveur distant. Par exemple effectuer sur un serveur musclé un calcul qui demande une grosse puissance de traitement puis rapatrier les résultats. Cette possibilité fut largement utilisée dans le passé par les instituts scientifiques et laboratoires. Telnet, auquel on reproche son manque de sécurité, est de moins en moins utilisé et laisse place à des protocoles mieux sécurisés. La figure ci-dessous illustre la communication entre un client telnet local et un serveur telnet distant.
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Tout ceci n'est qu'un apperçu des services mis à disposition par l'internet, biens d'autres sont maintenant disponibles : achat en ligne, paiement sécurisé, opérations en bourse, téléphonie, etc...

Le mode client-serveur

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Ce n'est pas ce que les fondateurs d'internet avaient en tête, ni ce que Tim Berners-Lee entendait avec son world wide web de documents hypertexte, mais c'est cependant ce qu'il en est advenu : le web fonctionne principalement en mode client-serveur.

Le mode client-serveur repose sur le modèle du veau et de la vache. Le veau c'est vous et la vache c'est le site web. Vous obtenez de la vache du lait et des cookies. Le lait c'est l'information que vous êtes venu y chercher. Les cookies sont des petits bout de texte que le site envoie dans votre ordinateur, souvent à votre insu, surtout dans le but de se faciliter son activité marchande ou bien dans un but de reconnaissance pour simplifier des transactions ultérieures.

Des tentatives sont faites maintenant pour restaurer au web son caractère peer to peer, c'est à dire d'égal à égal.

Biobliographie

TCP/IP (Le Tout en Poche), Joe Casad, Campus Press, (en français) ISBN 9782744015014

LINUX (Super poche), Stéphane Este-Gracias, Anne Nicolas & Jean-Claude Stiegler, Ed. Micro Application, ISBN: 9782742939077

Internet (Collection Que Sais-je ?), Arnaud Dufour, PUF, ISBN 9782130474692


    

File: internet.html, 2008-07-11 - Robert L.E. Billon - Last update: 2012-03-06