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Documents sonores et interviews de René BARJAVEL
Écrivain, homme de lettres, d'édition, de cinéma, de
communications, René Barjavel intervenait souvent sur les ondes
radiophoniques ou télévisuelles comme chroniqueur, critique, ou
simple témoin.
Certains de ces "détracteurs" lui ont reproché
d'intervenir pour tout et rien, comme ses collègues écrivains ou
critiques de science-fiction sans doute par ailleurs d'une autre
tendance politique que la sienne dans la revue Fiction (dans le no
236 d'août 1973, à l'occasion de la publication du roman
« Le Grand Secret »
Pourtant, avec le recul, ses interventions - malheureusement
rarement "sauvegardées" sur des enregistrements
accessibles - révèlent un bon sens et une chaleur humaine
qui est un des charmes de l'auteur.
Des recherches assidues m'ont permis de retrouver les
enregistrements que je propose sur cette page. La qualité
technique en est parfois plutôt médiocre, mais les circonstances
de leurs découvertes expliqueraient ces défauts.
Un des tous premiers documents date de 1944 : il s'agit,
le 31 janvier de cette année, de la remise du Prix des Dix
qui fut décerné à l'auteur pour Ravage et Le Voyageur
imprudent.
À cette période, les Prix et la vie littéraires furent quelque
peu bouleversés par l'occupation allemande et le contexte
politique : le régime de Vichy contrôlait la Société et
en particulier les Arts, les Lettres et le monde de l'édition. Le
prix Goncourt, et les membres de son Académie, furent l'objet de
controverses et querelles : le prix ne fut pas décerné en
1940, les jurés étant dispersés entre Paris et le Sud de la
France. La nomination reprit certes en 1941 (Henri Pourrat pour
« Vent de mars », très "fidèle" à la
ligne de pensée du Maréchal Pétain), et un "autre"
Goncourt, "de zone libre" fut décerné à Guy des Cars
pour « L'Officier sans nom ». En 1942 le jury s'étoffa
d'un nouvel académicien, Jean de la Varende, qui succédait à Léon
Daudet, et le prix fut décerné au roman « Pareil à des
enfants » de Marc Bernard, permettant à celui-ci de fuir la
Gestapo en zone libre...
En 1943, les membres ont bien du mal à se réunir, et finalement
le Prix fut attribué à Marius Grout pour « Passage de
l'homme ».
Il ne fut remis à son récipiendaire que l'année suivante ;
dans l'intervalle, "un jury de fantaisistes décida de se
substituer aux académiciens défaillants..."
Comme il le raconte dans le Journal d'un homme simple, René
Barjavel était pendant cette guerre chef de fabrication
des éditions Denoël. A ce titre, il avait bien sûr connaissance
des ouvrages édités, et parfois rencontrait leurs auteurs.
L'interview de Barjavel, rapportée dans l'émission de FR3
"Un siècle d'écrivains" consacrée à L. F. Céline,
laisse penser qu'il eût ainsi l'occasion d'assister à la découverte
de Céline par R. Denoël lorsque « Voyage au bout de la
nuit » fut publié.
Toutefois un doute apparaît, car les dates ne coïncident
pas ! En effet, « Voyage au bout de la nuit »
fut édité par Denoël en 1932 : cette année-là, Barjavel
était encore à Moulins au Progrès de l'Allier... Il devait effectivement
y faire la connaissance de Denoël, mais il n'était
pas possible qu'il soit déjà employé chez l'éditeur. On notera
cependant qu'il ne dit pas y être à cette date. Son récit
s'explique sans doute par ce que Denoël a pu lui en raconter, et
aussi par le fait qu'un récit similaire le concernant lui-même
est donné par une interview au sujet de la parution de Ravage
dans le dossier de l'édition Le Taillandier de « La
Charrette bleue » :
On organisait aussi des conférences à Vichy, et l'éditeur
Robert Denoël a été invité à parler des rapports entre éditeur
et auteurs.
- J'étais fou de littérature et pour
moi, à cet époque, Denoël était le Phénix. Il avait édité
le Voyage au bout de la nuit de Céline qui venait d'avoir le prix
Renaudot... On m'a chargé de le présenter au public. Je suis allé
l'attendre à la gare. C'était un grand garçon à peine plus âgé
que moi. Après sa conférence, nous avons passé la nuit à
bavarder. Je ne sais qui lui a envoyé le compte-rendu que j'avais
fait de sa conférence et de l'interview qu'il m'avait donnée. Il
m'a télégraphié en me demandant si je voulais venir travailler
chez lui. Inutile de dire que j'ai donné tout de suite mes huit
jours au Progrès de l'Allier et je suis monté à Paris.
- Robert Denoël était devenu un ami.
C'est lui qui a fait de moi un écrivain. En 193, je lui avais
apporté le manuscrit du roman qui devait s'appeler Ravage et
auquel j'avais voulu donner comme titre : Colère de Dieu.
En 1943, René Barjavel en avait donc apporté le manuscrit
à Denoël. Il l'avait trouvé bon, mais :
- Il n'a pas aimé le titre, Colère de
Dieu. Il a quand même lu le manuscrit dans la nuit et, le
lendemain, il a consacré sa matinée à me montrer quels étaient
mes défauts et mes qualités. Il a remplacé le titre par celui
de Ravage. J'étais jusque là un journaliste, il a fait de moi un
écrivain. En cette matinée, il m'a appris mon métier. C'était
un homme fantastique. A part Céline, tous ceux qui sont passés
chez lui lui doivent quelque chose de leur talent. Denoël était
un éditeur dans le grand sens du mot.

Une émission de télévision fut réalisée en hommage à Gérard
Philipe, et différentes personnalités du monde des arts et du
spectacle y témoignèrent de leur connaissance de l'acteur.
Barjavel avait écrit les dialogues de « Les Aventures de Till
l'espiègle », film de G. Philipe et Joris Ivens.
Il fut interviewé chez lui, et son témoignage reflète une idée
par ailleurs présente dans plusieurs de ses ouvrages l'amour,
la jeunesse et la beauté sont indissociables.
Chroniqueur à RTL dans les années 60-70, Barjavel salua avec émotion le premier
voyage des astronautes américains autour de la Lune (Apollo
8). Un dossier sonore concernant ce vol historique a été édité
par RTL sous forme d'un disque 33 tours contenant cette chronique de
Barjavel.
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